Lundi 21 octobre
A 210 km à l’est de Ciudad Real, le refuge de Motilla del Plancar tenu par Joaquin et sa fille Marta aidés par Jose. Après avoir roulé 1h30 sur l’autoroute depuis Ciudad Real, sortie Motilla del Plancar. Rendez-vous est pris par téléphone, non sans quelques difficultés de compréhension, pour qu’on nous accompagne au refuge. Pour accéder à celui-ci, nous avons du emprunter un chemin caillouteux et poussiéreux précédés de Jose venu nous indiquer la route. Aucune chance de le trouver sans notre « escorte » : le refuge est situé à l’extérieur de Motilla del Palancar, en plein milieu des champs.
Là, nous sommes accueillis joyeusement par un petit podenco attaché à l’ombre d’un arbre car nous a t-on expliqué, il ne s’entend pas avec les autres chiens pour l’instant. Nous faisons ensuite la connaissance de Joaquin qui nous invite à visiter le refuge tout en s’excusant car certains box n’ont pas encore été nettoyés. Environ 90 chiens répartis dans 12 box et dans un enclos, nous accueillent à leur tour, bruyamment, sautant, se bousculant pour réclamer des caresses, un peu d’attention. 2 superbes galgos, un mâle et une femelle prénommée Emma, attirent mon attention car beaucoup moins exubérants que leurs compagnons d’infortune. Il y a des regards qui en disent long et qui vous bouleversent à jamais.
En s’approchant, l’excitation redouble parmi les pensionnaires. Il y a là toutes sortes de chiens : des chiots, des chiens de chasse, des croisés, des podencos, plusieurs galgos, etc… Même si les échanges sont parfois compliqués et frustrants à cause de la barrière des langues, Joaquin nous explique que prendre soin de sa meute l’occupe à plein temps, tous les jours de la semaine. On le sent résolument dévoué et impliqué. Quel courage, quel exemple dans un pays où la condition animale est si peu prise en considération.
Tour des box pour une interminable distribution de caresses, le cœur serré , les larmes aux yeux car beaucoup resteront encore longtemps dans l’attente d’une adoption. Puis vient le moment de décharger une partie de la collecte : croquettes, couvertures, médicaments. Nous sommes chaudement remerciés néanmoins on se dit que tout ceci n’est qu’une petite goutte d’eau, une minuscule goutte d’eau. Envie de faire plus, toujours plus car ces chiens ne méritent pas de croupir dans des refuges aussi bien entretenus soient-ils. Difficile de partir mais un autre refuge nous attend.
Direction Iniesta, à une trentaine de kilomètres de là, au milieu des oliveraies, et sous le soleil.
Malgré le GPS nous cherchons un bon moment la rue où habite Maria Angeles, notre contact sur place. Après quelques manœuvres périlleuses dans des ruelles étroites (ouf, c’est Florent qui gère !) nous arrivons enfin. L’accueil est presque réservé…non pas que nous nous attendions à la fanfare locale et au tapis rouge mais quand même…
Nous reprenons la route, précédée par Maria Angeles en direction du refuge lui aussi à l’extérieur de la ville. A nouveau, chemin cabossé, caillouteux, poussiéreux puis apparaît un petit refuge qui de loin ne paie pas de mine. Sur place, l’impression se confirme. Pas mal d’objets hétéroclites traînent de-ci de-là.
Nous sommes accueillis mollement par un frère (?) de Maria Angeles ainsi qu’une horde de mouches beaucoup plus démonstratives. Là, encore plus qu’à Motilla la barrière de la langue est un véritable obstacle. Les échanges sont rares, peu de tentatives de communiquer malgré les efforts de Florent. Une fois le déchargement effectué, visite du refuge. L’odeur d’urine et de déjections est forte. Les mouches nous harcèlent sans relâche. Autour de nous, une petite vingtaine de chiens donnent de la voix.
Un gros chien tout timide n’ose pas s’approcher et reste en retrait dans son petit box. Le confort est plus que sommaire. Je ne vois aucun panier ou couverture. Impression de dénuement quasi total. Un joyeux loulou hirsute et un peu crasseux prénommé Perdido est sorti de son box et bondit un peu partout avec pour seul jouet un bout de caoutchouc qui avait du être jadis un ballon. J’avoue avoir comme une impression de malaise au moment de quitter les lieux après une rapide embrassade.
Mardi 22 octobre
En route vers Cordoba, au sud de Ciudad Real. Presque 3 heures de route au milieu de paysages contrastés. Rencontre avec Isabelle qui nous conduit dans son petit refuge, lui aussi difficile à trouver sans escorte. Elle s’arrête et nous montre un petit bâtiment délabré dans lequel sont enfermés 3 chiens, dans des conditions révoltantes. Elle nous explique que ces chiens appartiennent à des chasseurs et qu’ils restent enfermés là en attendant d’être emmenés à la chasse. Que dire ? Que faire ? Entre tristesse, colère et impuissance, les larmes montent inexorablement aux yeux.
Quelques mètres plus loin, nous arrivons au refuge d’Isabelle. Immédiatement, le contraste est saisissant avec le refuge d’Iniesta. L’odeur est celle de produits détergeant. Le lieu est propre et bien tenu. 5 chiens sont là, 6 autres sont en pension ou en FA. Un beau chien efflanqué avec une peluche dans la gueule vient vers nous. Distribution de croquettes, couvertures et médicaments.
En repartant nous apercevons un chien qui vagabonde sur la route. Impossible de l’attraper aussi nous déposons un peu de nourriture pour lui sur le bas côté au cas où il repasserait par là.
Puis rendez-vous est pris avec Manolo pour qu’il nous emmène jusqu’à notre prochaine étape. Petit arrêt pour acheter des paquets de croquettes supplémentaires. Nous allons à la Guarida à une dizaine de kimomètres de Cordoba. Le refuge est tenu par Nuria. Plus de 200 chiens nous attendent sur 5000 m2 de terrain. Une bonne vingtaine de chiens de petite taille et de taille moyenne dont quelques podencos nous y accueillent alors que nous franchissons la grille. L’un d’entre eux s’intéressant tout particulièrement à nos mollets pour nous souhaiter la bienvenue !! Nuria est là, presqu’ incrédule quand nous lui présentons le contenu de la camionnette. Il nous faudra d’ailleurs plus d’une heure pour tout décharger, ranger, stocker.
Nuria et Manolo nous emmènent visiter le reste du refuge qui est également une pension. Derrière une porte grillagée, un concert assourdissant de chiens nous accueille. Une horde bondissante et bruyante trépigne. Une fois la porte ouverte, c’est l’assaut ! Il en vient de partout. En un instant, nous sommes maculés de terre, de boue, la pluie s’étant elle aussi invitée ! Caresses à gogo ! Comment résister à tous ces loulous en demande de câlins et d’affection ?
De beaux et grands galgos efflanqués s’approchent timidement, bousculés par des loulous plus hardis. C’est franchement très impressionnant. Nuria connaît tous les chiens par leur nom. Visite de la « nurserie » qui compte une dizaine de bébés. Le confort paraît sommaire.
Visite des box où sont enfermés 2 American Staff et un pittbull dressés pour le combat et agressifs envers les autres chiens. Manolo veut nous montrer qu’il ne risque rien en pénétrant dans un des box. La visite se poursuit, escortés par une cinquantaine de loulous. Un magnifique et immense galgo s’approche, une galga décharnée apparait. Elle est atteinte de leishmaniose, en phase terminale.
Tout comme Joaquin au refuge de Motilla, Nuria consacre tout son temps à ses chiens. C’est une personne exceptionnelle, d’une grande gentillesse, souriante malgré les difficultés qu’elle rencontre, malgré l’ampleur de la tâche. La visite touche désormais à sa fin et Nuria revient accompagnée du magnifique grand galgo rencontré plus tôt. Il s’agit de Romeo que nous allons remonter en France car il a été adopté et est attendu avec impatience dans SA famille. C’est l’occasion de faire la connaissance de Patricia, bénévole de Galgos del Sur, l’association qui avait recueilli le beau gosse.
Quelques photos souvenirs et l’heure du départ a sonné. Une fois de plus, c’est le cœur serré que nous prenons place dans la camionnette, Romeo un peu ratatiné à mes pieds, étant donné sa très grande taille et l’exiguïté de la cabine. Retour à Ciudad Real, le cœur lourd de laisser tous ces loulous derrière nous. Je suis absolument admirative devant le travail accompli par tous ces bénévoles qui se battent au quotidien, et sans relâche, dans l’indifférence quasi générale, avec des moyens tellement dérisoires.
Ce voyage, bien que fatigant et éprouvant, autant physiquement qu’émotionnellement ne fait que renforcer l’envie de se battre pour faire changer les choses, même si ce que nous avons vu laisse peu de place à l’optimisme.
Olga et Florent Junior.