Hommage à notre guerrier blanc

7 mois. C’est le temps qu’il m’aura fallu pour surmonter colère et tristesse, et parvenir à écrire cet article. Un hommage que je voulais rendre à Kenaï, celui que nous avions surnommé notre petit guerrier blanc.

Kenaï était un jeune Galgo de 3 ans, attrapé avec beaucoup de difficulté alors qu’il errait dans les rues, malgré une patte cassée. Le corps couvert de plombs, positif à la leishmaniose, il avait passé quelques jours au refuge. Avant d’être transféré dans une famille d’accueil espagnole, parce qu’il ne supportait pas de vivre en box.

Décrit comme hyper traumatisé, son cas avait ému Joanna, qui avait décidé de le prendre en accueil. Lorsqu’il est arrivé en France le 15 juillet, Kenaï était presque inanimé dans sa caisse de transport. Les chauffeurs ont dit que la famille d’accueil espagnole leur avait amené dans cet état, qu’ils avaient, dans un premier temps, refusé de le transporter, mais que la FA leur avait expliqué que c’était dû à sa peur panique des humains, et que Kenaï ne « vivait » que lorsqu’il était seul. Les chauffeurs ayant pris soin d’enregistrer la conversation, j’ai pu avoir confirmation que les choses s’étaient bien passées de cette manière au départ d’Espagne.

Malheureusement, une fois arrivé chez Joanna, Kenaï s’est montré tout aussi apathique même lorsqu’il était seul. Pris en charge quelques heures plus tard par une petite clinique vétérinaire, Kenaï s’est révélé être en hypothermie, et ses analyses sanguines étaient catastrophiques. Les taux d’urée, de phosphates et de créatinine étaient 4 à 5 fois supérieurs aux normes maximales. Après 48 heures sous perfusion et lampe chauffante, la vétérinaire a reconnu qu’elle ne pouvait rien faire de plus, et a conseillé à Joanna de le ramener à la maison. Je suis allé moi même le chercher et, petit miracle, Kenaï avait réussi à se lever et à traverser la clinique.

Un espoir de courte durée puisque dès le lendemain, mardi 18 juillet, nous avons pris la décision de le transférer dans une clinique du Nord, spécialisée dans le traitement de la leishmaniose. Installé confortablement à l’arrière de la voiture, Kenaï avait trouvé la force de se lever et de venir poser sa tête sur mon épaule pour me faire comprendre qu’il avait soif. Immédiatement pris en charge par le Docteur Mutter et son équipe, un diagnostic peu encourageant a rapidement été posé. Kenaï souffrait d’hyperthyroïdie, et surtout d’une poussée de leishmaniose si massive que les reins avaient cessé de fonctionner. Ce que la famille d’accueil espagnole n’avait pas compris, considérant que cet état apathique était dû à la peur de l’être humain. Une course contre la montre s’est alors engagée, Kenaï se battant comme un guerrier. Avec cette terrible question en suspens, les perfusions allaient elles permettre à ses reins de se remettre à fonctionner?

Les premiers jours ont été encourageants. Les taux, bien qu’encore très élevés, commençaient à baisser. Même si le pronostic vital était encore engagé, l’équipe vétérinaire gardait espoir. Tous les 2 jours, j’allais passer un moment près de Kenaï pour le stimuler, et je sais qu’il appréciait mes caresses. Les choses se sont malheureusement compliquées le samedi 22. Si les taux de créatinine et de phosphates continuaient de baisser, l’urée restait presque bloquée, à un niveau beaucoup trop élevé. Ce qui semblait indiquer que les reins étaient définitivement morts. Kenaï ne souffrant pas, nous avons décidé avec le Docteur Mutter de poursuivre le traitement jusqu’au mardi. Je suis allé à la clinique ce jour là, mais l’urée n’avait pratiquement pas baissé durant le week end. Pourtant, notre petit guerrier blanc continuait de se battre.

Les chances de guérison devenaient infimes et, sur les conseils du Docteur Mutter, nous étions convenus d’aider Kenaï à partir le jeudi, si son état ne s’était pas amélioré. J’avais prévu d’aller voir Kenaï le mercredi après midi. Mais dans la matinée, la clinique m’a appelé pour me dire que notre petit guerrier venait de rendre les armes et avait sombré dans le coma. Une heure plus tard, j’étais à son chevet. Je suis resté un moment seul avec lui, le temps de quelques mots et des ultimes caresses.

J’ai pris sa patte dans une main, sa tête dans l’autre et le Docteur Mutter m’a rejoint pour aider ce loulou si attachant à rejoindre le paradis. A 11h11, le petit cœur de Kenaï s’est arrêté. J’ai repris son corps pour l’amener chez Joanna, où il repose désormais dans le jardin.

C’était le 26 juillet, il y a 7 mois jour pour jour. Les vétérinaires de la clinique Mutter ont fait tout ce qu’ils pouvaient avec professionnalisme et amour, et je les en remercie. Kenaï aurait il pu être sauvé s’il avait été diagnostiqué plus tôt en Espagne? C’est possible, même si nous n’aurons jamais la certitude. Mais comment sa famille d’accueil a-t-elle pu se tromper à ce point? Comment peut on rester sans réaction lorsqu’on voit un loulou dépérir de la sorte? 7 mois après, j’en veux toujours à ces gens qui n’ont rien vu, et j’en veux à ce destin qui peut parfois être si cruel.

Certains penseront peut-être que c’est stupide d’avoir attendu 7 mois pour écrire cet article, mais je voulais attendre que la colère s’estompe. Mais surtout je tenais à te rendre cet hommage beau Kenaï, à toi notre petit guerrier blanc qui t’es battu comme un lion, et qui reste gravé dans mon cœur à tout jamais. Je sais que de là haut, tu veilles sur nous, et que tu nous donnes la force de continuer le combat pour tes frères et sœurs de misère. Repose en paix beau Kenaï, et pardonne nous de n’avoir pas pu te donner la vie que tu méritais.

Et en ce triste 26 février, j’ai également une grande pensée pour notre Amie Marcelle, qui nous a quittés il y a tout juste un an.

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17 Responses to “Hommage à notre guerrier blanc”

  1. Marie-Annick MEURA dit :

    Cher Jean-Philippe, merci de cet hommage que tu rends à Kenaï avec tant d’amour. Ce qu’il a eu à souffrir et le courage qu’il a eu face à cela donnent tellement à l’aimer et à lui demander pardon, comme tu dis, de n’avoir pas pu tout lui éviter, car cela ne devrait jamais exister. Tu es vraiment un défenseur hors pair pour ces animaux qui ont une âme, un esprit, un corps qui souffrent souvent de manière inadmissible, et ta présence totale aux côtés de notre guerrier blanc dans ce parcours qui a été le sien jusqu’à son départ ne peut qu’être un baume pour nous tous. Merci de tout ce que tu fais pour ces animaux. Tu es formidable. Et ta pensée pour Marcelle nous ramène à la femme de coeur qu’elle était et à ce que nous lui devons. Puisses-tu être en paix, Marcelle, et veiller, avec Kenaï et tous ceux que vous avez rejoints et qui vous ont rejoints, sur tous ceux qui sont en danger, et ont besoin d’être sauvés et protégés. Bonne journée à tous.

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